
Par Guillaume Decroix,
référent adjoint de la RCPA, trésorier de la SEPAS,
Sous-Directeur de l’administration et de la valorisation de l’immobilier de l’État
Le patrimoine est le ciment d’une nation. Articulé entre art, mémoire, histoire et culture, il relie les hommes et fait société. Consciente de cette réalité, l’Armée de l’Air et de l’Espace a mobilisé ses réservistes citoyens du réseau ADER regroupés dans la Task Force Patrimoine & Rayonnement, pour imaginer un outil qui permettrait de répondre aux enjeux nouveaux de notre société en s’appuyant sur la valorisation du patrimoine de la troisième dimension.
Deux ans de travail intense ont permis de mettre sur pied la Réserve Citoyenne du Patrimoine Aéronautique (RCPA), avec comme objectif de préserver et transmettre ce patrimoine constitutif du monde contemporain.
Quelques mots sur la genèse de la RCPA
Depuis 1994, la Société des Experts du Patrimoine aéronautique et Spatial (SEPAS) créée par Jean Salis, Christian Ravel et Max Armanet fait le lien entre le monde institutionnel, en particulier celui de la Culture et de la Défense et celui du monde associatif qui préserve, transmet les savoir-faire séculaires, et fait voler.
C’est à l’initiative du ministère de la Culture dès 1998,que Max Armanet, président de la SEPAS et alors secrétaire général de l’Aéro-Club de France organise le Champ d’aviation sur les Champs Élysées avec 3,5 millions de visiteurs, rencontre la Ministre de l’époque qui l’engage à travailler avec le Directeur de l’architecture et du patrimoine, François Barré.
De cette rencontre naquit la commission présidée par Max Armanet qui rendit le rapport sur l’avenir du Hangar Y de Meudon ainsi que sa nomination comme membre de la Commission nationale des monuments historiques et comme expert pour le patrimoine aéronautique auprès du Ministère.
Le ministère de la Culture initia alors une politique dynamique avec l’aide des experts de la SEPAS qui a permis la protection au titre des monuments historiques de 25 aéronefs ainsi que celles des bâtiments emblématiques de cette culture (Grande soufflerie de Meudon, Aérogare du Bourget, Hangar Y,….)
Quelles sont les objectifs de la RCPA ?
L’enjeu est de s’adresser à l’ensemble des citoyens en faisant une place privilégiée à notre jeunesse, en leur faisant découvrir l’histoire et son patrimoine industriel, en leur donnant l’envie de participer à sa réhabilitation.
En résumé d’assurer sa transmission en permettant à chacun de rêver son futur.
Le patrimoine industriel aéronautique par le grand nombre de processus industriels et les technologies qu’il met en œuvre est à cet égard un creuset idéal, il a de tous temps été créateur d’innovations majeures souvent portées par les intérêts de défense et de l’économie nationale et mondiale. Passé, présent et avenir se conjuguent pour permettre la création d’un lien fort entre le patrimoine aéronautique, la société et le monde du travail par la mise en place de cursus d’apprentissage qui allient valorisation du patrimoine et formation.
L’Armée de l’Air et de l’Espace, riche d’un patrimoine aéronautique prestigieux et d’une expérience approfondie de la Réserve Citoyenne a pris part à cette dynamique, et a pris l’initiative de demander à son réseau des réservistes citoyens ADER de créer une RCPA, en charge de mettre en va¬eur le patrimoine industriel aéronautique militaire mais aussi civil. Un groupe de réservistes du réseau ADER piloté par Max Armanet, bientôt rejoint par d’autres spécialistes du monde aérospatial s’est réuni chaque semaine pendant 2 ans pour donner vie à cette idée fédératrice !
La RCPA a une vocation transversale, et se devait d’associer un grand nombre d’acteurs :
• L’univers de l’Education Nationale avec la mobilisation des classes de tous milieux y compris les lycées professionnels dans le cadre de la réalisation de leur « chefs d’oeuvres»
• Le monde de la Culture avec l’appui des DRAC et du tissu des musées locaux mettant à disposition leurs archives et éventuellement des biens à restaurer dans le respect du patrimoine remarquable ou classé,
• Le monde de la Défense en mobilisant ses réservistes citoyens du réseau ADER ainsi que ses réservistes citoyens actuellement rattachés aux différentes bases aériennes ;
• Et enfin, la société civile réunissant des représentants spécialement choisis en fonction de leur activité ou de leurs compétences liées au patrimoine ou à la mémoire.
Pour ce qui concerne l’organisation de la RCPA, l’enjeu a été de mettre en place une organisation pérenne qui couvre l’ensemble du territoire, y compris les déserts militaires et qui soit capable de fonctionner de manière souple, légère, efficace.
Pour ce faire, il apparaissait indispensable de prendre appui sur une volonté politique au plus haut niveau et cela nous a conduit à porter sur les fonts baptismaux une convention interministérielle entre les trois ministères, Education nationale, Culture et Armées.
Nous en avons initié la rédaction en veillant à préciser les ambitions et interventions de chaque ministère.
Ce texte a ensuite été circularisé et peaufiné dans chacun des ministères pour être in fine soumis à la validation des cabinets ministériels et à la signature des ministres concernés.
Après deux ans de travail, nous avons eu l’honneur de voir « notre convention » signée le 24 novembre 2023 par les quatre ministres en charge des Armées, de l’Éducation nationale et de la jeunesse, de la Culture, des Anciens combattants et de la Mémoire.
Parallèlement, en lien étroit avec le CESA, nous avons sans attendre initié des opérations « test » : Un premier territoire d’expérimentation a été identifié à Angers tourné vers l’aviation légère et l’autre à Vernon consacré à ce qui est le berceau du spatial européen ainsi que la mise en place d’un CODIR dont le référent est Max Armanet.
Le processus RCPA est désormais en place avec un mode opératoire de déploiement des projets qui se déroule selon le schéma suivant :
• Identification d’un patrimoine et des opportunités pour améliorer la situation et étudier auprès de l’Armée de l’air et de l’espace ou du ministère de la culture, la mise à disposition d’un patrimoine à des fins de conservation et de valorisation,
• Mise sur pied d’un système d’accréditation des associations ou autres organismes pouvant être habilités à recevoir du matériel, voire à le mettre en œuvre,
• Proposition d’un plan d’action pour faire valoir, grâce à l’histoire et au patrimoine, le rôle de l’Armée de l’air et de l’espace dans la stratégie de défense de la France, en particulier dans ses caractéristiques de permanence, de réactivité et de liberté d’action,
• Le soutien des initiatives mémorielles créatives et innovantes qu’elles soient civiles ou militaires afin d’aller à la rencontre de nouveaux auditoires, notamment des jeunes générations, pour expliquer les sujets mémoriels du monde combattant selon des codes et formats en prise avec notre époque,
• L’échange de savoir entre des publics d’âges différents et l’ action en faveur du lien social, pour transmettre un passé constitutif de notre identité commune tant civile que militaire, ce qui est fondamental pour envisager l’avenir.
Pour finir, nous travaillons avec chaque ministère pour que ce mode opératoire soit diffusé dans ses réseaux. Afin que chaque Commandant de base aérienne, chaque Recteur d’Académie et chaque Directeur Régional des Affaires Culturelles dispose des informations nécessaires pour la mise en œuvre des RCPA locales.
Une aventure nationale, fédératrice à commencer; le CODIR RCPA peut accompagner chaque territoire !